• Le dimanche suivant, le messager revint avec la réponse. Enjoy voulu la lire, mais son père s'en empara avant lui. Il refusa de la lui montrer tant qu'il ne l'aurait pas finie.

    En arrivant à une certaine ligne, son père sursauta. Ainsi, lorsque qu'Enjoy tenta à nouveau de s'en emparer, il le repoussa et lui cria : 

    « Je ne t'ai pas autorisé à la lire ! Cela ne te regarde pas ! »

    Enjoy ne comprenait pas. Cette lettre lui était destinée, à lui, comment pouvait elle ne pas le concerner ?

    Il monta les marches pour rejoindre sa chambre, encore sous le coup du choc. Qu'est ce que Clarence avait elle bien pu écrire de si grave pour déclencher une réaction aussi absurde chez son père ?

    Cela raviva sa curiosité, et il décida d'aller un de ces jours la lire en cachette. Avant d'avoir eu l'occasion de le faire, son père l'appela pour venir écrire la réponse; la réponse d'une lettre qu'il n'avait donc pas lue.

    Comme toujours, dictée était au programme.

    «Chère Clarence,

    Je me permet de vous appeler par votre prénom puisque vous en faites de même avec moi.

    Vous souhaitez apprécier la littérature. Je vous envoie donc un livre appartenant à mon père, intitulé " Le sort réservé aux curieux au XII ème siècle " . Je vous conseille de le lire, il est assez intéressant, moral et a un bon contexte historique.

    Vous pouvez également tirer un trait sur le " rendez vous " . Et, que me reprochez vous au sujet de ma chambre ? Je serais curieux de le savoir.


    Enjoy Ludovic d'Atenay, le 24 mars.

    PS: J'ai appris quelque chose sur vous. Alors oui, je vais bien. »


    Encore une fois, Enjoy regretta de devoir signer, alors qu'il n'était à l'origine de rien concernant le contenu. Cette lettre signée de sa main était pour lui incompréhensible, puisqu'il n'avait même pas lu celle de Clarence. Il avait encore plus envie de la lire.

    Quel était ce "rendez-vous" ? Pourquoi son père avait-il fait le choix de lui envoyer ce livre ? Et, de quoi parlait ce livre, par ailleurs ? (NDA: mieux vaut ne pas s'y intéresser....) Depuis quand son père avait-il ce genre de lecture ? Toutes ces questions y contribuaient.

     

    NeuroGalaxy, une partie de sa vie

     

    Le soir, ses parents s'absentèrent. Il en profita alors pour mettre fin à ses interrogations.

    Enjoy marcha à pas de loup jusqu'au bureau de son père, en prenant garde à ne pas réveiller les domestiques, et mis une bonne dizaine de minutes à trouver la lettre, tant elle était bien cachée. Finalement, il la trouva au fin fond d'un tiroir, et ouvrit l'enveloppe déjà décachetée. Il commença la lecture non sans entrain.

    «Très cher Enjoy,

    J'ai été vraiment heureuse de recevoir votre lettre.  Je me suis empressée de vous répondre et m'y voilà. J'ai fêté mon treizième hiver il y a cela un peu plus d'un mois.

    J'aimerais déjà vous poser une question : vous croyez vous disposé à parler de "votre" chambre ?

    Sinon, vous m'aviez demandé de parler de ce que j'aime.

    Eh bien, j'aime; j'aime, la littérature; j'aime, le théâtre; et puis, j'aime les arts en tous genres.

    Vivant à la campagne, tout comme vous, j'aime la nature, aussi. Tenez, cela vous direz de venir me rendre visite dans ma forêt préférée ? La Forêt de l'Eternité. Vous êtes invité.

    Et, pourquoi faire croire que l'on ne pourrait pas se voir, alors qu'il n'en a jamais été question ?

    Je me porte bien, sinon. Et vous ?

     

    Le 17 mars.

    Clarence Jeanne d'Anvers. »


    Pourquoi faire croire que l'on ne pourrait pas se voir, alors qu'il n'en a jamais été question.

    Pourquoi faire croire que l'on ne pourrait pas se voir, alors qu'il n'en a jamais été question.

    Pourquoi faire croire que l'on ne pourrait pas se voir, alors qu'il n'en a jamais été question.

    Depuis qu'il l'avait lue, cette phrase résonnait dans la tête d'Enjoy.

     

    Encore sous le choc de ce qu'il venait de lire, il décida de s'activer et se dirigea vers la bibliothèque. Il y trouva le fameux livre "Le sort Résérvé aux curieux au XIIe siècle", en une dizaine d'exemplaire, ainsi qu'un livre nommé "Grand ATLAS des régions françaises". N'y trouvant pas ce qu'il cherchait, il prit alors un autre ouvrage, intitulé "Plan détaillé de la Basse Normandie". Il se rendit dans l'Index et chercha au mot forêt... Pas une trace de "Forêt de l'Eternité".

    « Bon, il est tant que j'aille me coucher, Père et Mère ne vont pas tarder à rentrer.  »

    Il remonta alors à sa chambre tout en pensant aux évènements qui s'étaient produits dans la journée. Une fois à destination, il éteignit sa chandelle et plongea dans un profond sommeil.

    Plus loin, derrière une poutre, un domestique l'observait....

     

    FIN DU CHAPITRE 2

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  • Le jour de la naissance d'Enjoy fut, pour certains, considéré comme un grand événement; pour d'autres, comme un jour sans grande importance.

    Ce fut sa mère qui lui donna son prénom, qu'elle choisi pour l'une de ses syllabes en particulier : celle de la joie.

    Dès sa première année, le petit Enjoy bénéficia d'un majordome et de plusieurs domestiques à son service. Il vécut son enfance comme tout noble de son rang, malgré un père sévère et l'absence de compagnons de jeux. Ainsi, il passa des années à jouer seul, dans son jardin, quelques fois escorté par des domestiques.

    Le jour de ses cinq ans, il eut droit à un banquet d'anniversaire, comme il était usage chez les nobles; pour lui, pourtant, c'était la première fois. La première fois qu'on lui portait autant d'attention.

    Nobles et bourgeois de tous genres y furent conviés; la fête devait durer trois jours, pour plus d'une centaine d'invités * qui logeaient dans les auberges alentours.

    ( * : la fête avait plus pour but de faire valoir la puissance de la famille que de célébrer la venue au monde d'Enjoy )

    Le petit Enjoy n'avait jamais vu autant de monde auparavant, et il ne cessait de s'émerveiller.

    « Tous ces gens viennent pour toi, Enjoy » lui avait dit sa mère .

    Mais il n'en avait pas cru un mot .

     

     Alors que la fête battait son plein, Enjoy remarqua une petite fille d'à peu près son âge se tenant fièrement en haut de la balustrade.

    Lui qui n'avait jamais eu d'amis, si ce n'était que ses domestiques, il éprouva soudainement le désir de faire sa connaissance. Il la fixa longuement, tout en essayant de rassembler son courage pour lui parler.

    Il l'admirait dans toute sa splendeur, de la majesté dont elle dégageait, de son allure différente à celle de toutes les personnes qu'il avait connu jusqu'alors ...

    Il contemplait ses longs cheveux blonds, tombant telle une cascade sur ses frêles épaules; sa jolie robe de velours rouge,  parsemée de rubans et de dentelles; et surtout, ses magnifiques yeux verts reflétant la douceur et la pureté de l'enfance.

    Il finit par se décider à aller la rencontrer, et, alors qu'il montait les escaliers pour la rejoindre, elle commença à s'éloigner. Dans sa fuite, elle fit tomber quelque chose, quelque chose de brillant qu'Enjoy remarqua. Cet objet était tombé par delà la balustrade,  et Enjoy descendit le ramasser. C'était une bague.

     

    Pendant des années, Enjoy garda précieusement la bague, en souvenir de celle qui "aurait pu devenir son amie". Sur la bague étaient gravées les initiales "M. L-M", dont il ignora longtemps la signification.

     

    Des années après, alors qu'il avait dix ans, il apprit de ses parents qu'il allait être fiancé. La nouvelle lui semblait trop brutale, pour lui qui n'y avait jamais songé.

    « Elle se nomme Clarence d'Anvers, et n'est que légèrement plus âgée que toi » lui avait dit sa mère.

    Son père argumenta : « La famille d'Anvers est plutôt fortunée, c'est un bon parti. De quoi assurer ton avenir... »

    - Mais ... Je ne la connait pas ! » s'écria Enjoy.

    « Enfin, Enjoy, voyons, c'est naturel. D'ailleurs, tu n'es pas autorisé à la voir avant ton mariag... »

    Enjoy, dégouté, sortit de la salle en trombe, sans écouter la fin de la phrase. Il maudissait ses parents, il maudissait sa famille. Il maudissait son époque d'en faire une banalité. N'avait-il pas le droit de choisir sa vie lui même ? Etait-il destiné toute sa vie à n'agir qu'en faveur de sa famille ?

     

    En se rendant à sa chambre, il se heurta par mégarde à son majordome.

    « Dé... Désolé ! » dit-il précipitamment, cherchant à ne pas s'éterniser ainsi devant lui. Mais, sans qu'il ne puisse s'en empêcher, Enjoy se mit à pleurer, et à son grand malheur son domestique le remarqua.

    - Qu'il y a t-il, Monsieur ?? Vous ne vous sentez pas bien ? »

    - Ce n'est rien, Geoffroy, je ... j'ai attrapé froid » s'exclama Enjoy, alors que ses larmes coulaient de plus belle.

    - Je vois bien que ce n'est pas dû à cela », soupira le majordome. «Vous pouvez tout me raconter, vous savez. Je garderai cela pour moi... »

     

    Ils étaient à présent tous les deux dans le couloir,  appuyés sur le rebord d'une fenêtre.

    « Un mariage arrangé ? »

    Le jeune garçon hocha la tête.

    « Et ? ... Et donc ?? » s'exaspéra le majordome.

    - Eh bien, Geoffroy ... C'est affreux, ne trouves tu pas ??  »

    - C'est toujours malheureux de ne pas avoir le choix ... Mais Monsieur, enfin, je dirais presque que c'est ... non, C'EST quelque chose de commun, entre nous !  Moi aussi, si, euh, si je ne vous avez pas connu, je ... ». Il se crispa, et mit sa main à son visage.«Finalement, ce n'est peut être pas une si mauvaise chose ... j'avoue que, cela ne m'aurait pas plu. »

    - Ah, Geoffroy, toi au moins promet moi que tu ne te marieras jamais.

    - Cette promesse... oh oui... je peux la tenir. »

     


    Enjoy eut bientôt la charge d'échanger une correspondance avec sa fiancée dont il ne connaissait que le nom. Cela l'incommodait plutôt, mais il n'avait pas vraiment le choix.

    Ainsi, il devait rédiger une lettre par semaine. Ce serait le vieux messager de la famille qui s'occuperait des échanges.

    Mais la rédaction de ses lettres ne se passèrent pas comme il le pensait. En effet, ses parents, le jugeant trop immature, décidèrent de se charger eux même du contenu des lettres. Il du donc se contenter de recopier ce que son père lui dictait. 

    «  Chère Mademoiselle.

    Pour commencer, je me présente. Je me nomme Enjoy d'Atenay et j'ai fêté mon dixième hiver en décembre. 

     Moi et ma famille vivons à la campagne. J'aime bien jouer dans le jardin, et écouter les oiseaux chanter par la fenêtre de ma chambre. Et vous ?  Qu'aimez vous donc ?


    Bien cordialement,

    Le 14 mars,

    Enjoy Ludovic d'Atenay. »


    « Il faut commencer par faire simple, Enjoy  », lui avait conseillé son père.

    Enjoy aurait bien voulu suivre le conseil, si seulement il l'avait laissé écrire. Il sentait de plus en plus à quel point il ne pouvait formuler aucun choix, et il n'en ressortait qu'encore plus troublé.

     

    FIN DU CHAPITRE 1

     

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